Netflix a récemment mis en ligne un entretien de Volodymyr Zelensky réalisé en octobre dernier par l’humoriste et animateur américain David Letterman dans le métro de Kiev.
« Notre conversation se déroulera dans le lieu le plus sûr de Kiev, à 100 mètres sous terre sur un quai de métro en service. » C’est par cette introduction que débute l’entretien entre David Letterman, homme de télévision très célèbre aux Etats-Unis, et Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine, un pays qui subit depuis le 24 février dernier l’agression de son puissant voisin russe. Et effectivement le métro est l’un des endroits les plus sûrs de Kiev. Datant du début des années 1960, il s’agit du troisième réseau à avoir été mis en service en Union soviétique après ceux de Moscou et de Saint-Pétersbourg. Il a été construit à une très grande profondeur avec la volonté de faire de ses stations des abris antiatomiques en cas de besoin. 47 stations du réseau de métro de la capitale ukrainienne sont ainsi répertoriées comme abri antiaérien par les autorités de la ville.
Enregistré en octobre, cet épisode spécial mêlant des extraits de cet entretien et de plusieurs témoignages d’Ukrainiens a été mis en ligne le 12 décembre dernier. David Letterman pose des questions depuis 40 ans. Il anime depuis près de 30 ans le « Late show » de la NBC, puis de CBS. Depuis 2018, il a rejoint le catalogue Netflix avec son émission Mon prochain invité. Dans ce nouveau programme, il délaisse parfois les stars de la pop culture qu’il a l’habitude de titiller pour la réalisation d’entretiens au contenu plus politique. Il a notamment reçu l’ancien président Barack Obama – l’ancien président s’ouvrant au présentateur dans le tout premier épisode de la série, ou encore la militante des droits des femmes Malala Yousufzai. Mais pour la première fois, il interviewe un président en exercice.
Dans un premier temps, David Letterman doit pouvoir rejoindre son invité… Et dans ce pays en guerre, c’est grâce au train qu’il y parvient. Il doit d’abord se rendre à Przemysl, au sudest de la Pologne, une petite ville à moins de 30 km du poste frontière de Medyka, qui est devenue un carrefour ferroviaire important entre l’Ukraine et le reste du monde. Letterman y monte à bord d’un train de nuit ukrainien à destination de la capitale. Un trajet accomplit en 14 heures. Arrivé en gare de Kiev, il se rend directement en sous-sol pour rencontrer un président ukrainien décontracté – il porte un sweat à capuche simplement barré d’un « I’m Ukrainian » (Je suis Ukrainien).
Le passage des rames de métro rythme l’interview et, souvent, le président doit un peu élever la voix pour être entendu. Illustration frappante que la guerre est bien présente, l’entretien est même interrompu par une sirène d’alerte antiaérienne.
Le président ukrainien tente d’expliquer à Letterman comment l’irruption de la guerre a affecté son pays. Zelensky relate notamment les conséquences sur les enfants d’un conflit armé : « Poutine leur vole leur enfance. A 9 ans, mon fils connaît le nom de toutes les armes. »
David Letterman se rend également dans un club de comédie local pour rencontrer un humoriste ukrainien et monter sur les planches pour offrir quelques blagues au public. En gare de Kiev, le présentateur américain rencontre également Oleksandr Kamyshin, le directeur général d’Ukrzaliznytsia, les chemins de fer ukrainiens. Celui-ci a pris la tête de la société nationale six mois avant le début de l’agression russe. Avec 231 000 agents, il est à la tête du premier employeur du pays. Nommé par le président Zelensky, il est parvenu à maintenir l’activité ferroviaire malgré les nombreuses destructions et un danger constant.
Le comédien devenu président démontre qu’il sait encore comment toucher le public. Il connaît également l’importance de l’humour quand surviennent les drames. Il lâche ainsi que l’humour « nous empêche de devenir fou ». Et se risque même à faire une petite blague. C’est l’histoire de deux juifs d’Odessa… Le premier prend des nouvelles de la guerre « entre la Russie et l’OTAN ». « Les Russes ont perdu 70 000 hommes, tous leurs missiles et beaucoup d’équipements militaires », répond le second. Et l’OTAN ? reprend le premier. « L’OTAN ? Ils ne sont pas encore arrivés… »
