Située sur la ligne de Paris-Lyon à Marseille- Saint-Charles, la gare de Laroche-Migennes et son dépôt constituent une étape essentielle à l’époque de la vapeur, à mi-chemin entre Paris et Dijon. Son histoire se comprend à travers celle d’une communauté cheminote soudée, qui vit dans un quartier neuf, construit par la compagnie de la PLM, à l’écart du premier village paysan. Avec l’arrivée du train, la population locale explose. Entre 1880 (le dépôt ouvre le 1er avril) et 1914, elle quadruple !
Le film Laroche-Migennes, 52 minutes d’arrêt revient sur cette histoire industrielle et humaine. Initialement diffusé sur France 3 Bourgogne Franche Comté, ce documentaire réussi sort maintenant en DVD. Il nous plonge dans la nostalgie d’une culture cheminote fière et forte. Nous rencontrons des habitants, des cheminots, qui nous livrent leur vision de Laroche- Migennes. Notre confrère, l’historien et sociologue Georges Ribeill, explique toute l’importance de ce dépôt et l’histoire de cette cité qui vibre au son des locomotives.
Quand la seconde guerre mondiale s’abat sur le continent, Laroche-Migennes est directement touché. D’abord, après la défaite de juin, la gare et le dépôt qui se trouvent en zone occupée sont réquisitionnés par les Nazis et deviennent la cible des résistants. Rapidement, les sabotages se multiplient dans les rotondes. Un résistant surtout va marquer les esprits : Louis Riglet, un cheminot muté en avril 1942 à Laroche-Migennes. Ce militant communiste réorganise le réseau de résistance du dépôt avec Henri Surier, Henri Séguinet et Georges Chabanna. Le 25 août 1943, il parvient avec ses camarades à détruire 18 locomotives à vapeur! Le 31 mars 1944, il est arrêté et incarcéré dans la prison d’Auxerre. Il y meurt sous la torture et ne connaîtra pas la Libération. Une libération qui fait de Laroche-Migennes une cible de choix pour les alliés. Le 31 juillet 1944, 127 bombardiers s’envolent de Grande-Bretagne avec pour mission de détruire le dépôt, le triage et la gare. En tout ce sont 1!000 tonnes de bombes qui s’abattent sur la ville. Le poste d’aiguillage, qui date des années 1930, porte toujours les stigmates de cette attaque. Deux tiers de la ville est détruit. Après la guerre, Laroche-Migennes vit un grand bouleversement. L’électrification du réseau ferré change le monde cheminot en profondeur et la reconversion est compliquée. Et Laroche- Miennes perd surtout son statut d’étape obligatoire entre Paris et le sud de la France… Le déclin est inévitable.
Ce documentaire nous emmène dans l’intimité de cette communauté où cheminots, ouvriers et paysans se mélangent. Une multitude d’anecdotes et de souvenirs sont ici évoqués. Ainsi, c’est non loin de la gare que l’une des carrières les plus réussies de la chanson française a débuté. Quand Michel Wattelier devient propriétaire du lieu, il ouvre son carnet d’adresses bien rempli pour faire venir en train les plus grandes vedettes de l’époque, Jacques Brel, Charles Trenet, Juliette Gréco ou encore Charles Aznavour. Mais l’endroit est surtout célèbre pour avoir accueilli les grands débuts de Johnny Halliday qui a signé ici son premier contrat d’artiste le 6 avril 1960. Trois récitals de 9 chansons pour 500 nouveaux francs et un billet aller/retour Paris – Laroche Migennes…
Laroche-Migennes, 52 mn d’arrêt de Xavier-Marie Bonnot et Eric Lebel.
France Télévisions, Callysta Productions, Les films grains de sable, avec la participation de la Région Grand Est et du CNC.
Disponible à la boutique de La Vie du Rail au 29 rue de Clichy et sur son site.