Cinq ans après sa transformation en SNCF Voyageurs, la compagnie ferroviaire dresse un bilan positif et ambitieux. Avec une augmentation de 20 % de son chiffre d’affaires, elle se prépare à une transformation radicale face à l’ouverture à la concurrence qui touchera bientôt 100 % de ses activités. « Nous deviendrons un groupe avec des dizaines de filiales, chacune adaptée à un marché spécifique. Nous avons cinq ans pour accélérer cette transformation », déclare Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs.
La société se concentre sur un plan stratégique baptisé « Destination 2030 ». Le premier axe de ce plan est la restructuration de son mode de fonctionnement autour de ses filiales, tant en France qu’à l’international. « Les responsabilités seront décentralisées, permettant une plus grande capacité de décision et d’action sur le terrain », souligne le dirigeant. « Nous ressemblerons alors plus à Keolis qu’à la SNCF historique », ajoute-t-il.
Un « PAC délégation de service public » sur les rails
Pour répondre à la multiplication des appels d’offres (plus d’une vingtaine cette année), un « PAC délégation de service public » sera mis en place. Ce dispositif réunira des équipes dédiées pour gagner en expérience et en performance. « Le modèle de Keolis nous a beaucoup inspirés », explique Tanguy Cotte-Martinon, secrétaire général de SNCF Voyageurs.
Le troisième axe du plan concerne la conquête des marchés de la grande vitesse ferroviaire en France et en Europe. « C’est vital pour l’entreprise. Nous ne serons pas dans le défensif mais surtout dans l’attaque », indique Christophe Fanichet. « L’entreprise sera profondément décentralisée avec une volonté de conquête assumée sur tous les marchés : grande vitesse, activité industrielle et distribution avec SNCF Voyages & Tech », ajoute-t-il.
Croissance européenne
SNCF Voyageurs vise une intensification de sa croissance sur le marché européen, avec un objectif de 30 % de trafic en 2030, contre 22 % actuellement. L’entreprise prévoit également de doubler son chiffre d’affaires à l’international, qui représente actuellement 3 milliards d’euros sur un total de dix milliards. En Europe du Sud, sa filiale Ouigo Espagne a étendu son réseau en ouvrant les lignes Madrid-Séville et Madrid-Malaga. La SNCF attend aussi les TGV nouvelle génération (TGV M) pour s’élancer en Italie. Sur le modèle de la coopération, SNCF Voyageurs a lancé avec la Deutsche Bahn un aller-retour quotidien entre Paris et Berlin. Les deux partenaires prévoient également cinq allers-retours quotidiens entre Paris et Munich, dès la fin des travaux de la gare de Stuttgart.
Côté Eurostar, après la fusion avec Thalys, de nouvelles perspectives s’ouvrent avec l’ouverture de nouvelles destinations. SNCF Voyageurs annonce vouloir acheter des rames pour renouveler la flotte d’Eurostar.
Plus de places sur le marché domestique
SNCF Voyageurs affiche également une belle croissance sur le marché français. Pour répondre à la demande, elle assure qu’elle offrira plus de places malgré un nombre stable de rames TGV (360 rames) en attendant la livraison des TGV M (115 rames commandées, dont 100 pour le marché domestique). La compagnie a mieux réparti les rames là où il y a le plus de trafic et affirme qu’elle offrira 2 millions de places en plus en 2025 sur l’axe Atlantique et 2 millions de plus en 2026. « Nous ferons plus rouler les rames pour proposer plus de trains et nous travaillons sur la capacité des rames en investissant 250 millions d’euros dans des opérations mi-vie et pour faire passer le nombre de sièges de 509 à 556 places. Nous augmentons aussi leur durée de vie : 104 rames seront prolongées entre deux et dix ans », résume le patron des TGV qui attend les nouvelles rames commandées (les TGV M) à partir de la fin 2025-début 2026.
Le réseau de Ouigo va aussi se déployer avec 20 nouvelles destinations, tout comme le réseau Intercités et trains de nuit.
Cinq milliards seront ainsi investis les cinq prochaines années pour les TGV et pour les maintenir. « Notre ambition c’est d’être leader du marché national et européen », répète Christophe Fanichet. 163 millions de voyageurs ont pris le TGV l’an dernier dont 125 millions en France. SNCF Voyageurs vise 200 millions de clients en 2030, puis 240 millions quelques années plus tard.
MH P
Un nombre de rames stable mais des sièges en plus
Selon Alain Krakovitch, considérer le nombre de rames de la SNCF pour en déduire le nombre de sièges offerts n’a pas de sens. « Il faut regarder le nombre de places et le nombre de kilomètres réalisés. En 2014, nous avions 450 TGV avec 400 places en moyenne par TGV qui parcourait 400 000 km par an. 20 ans après, nous avons 360 rames de TGV qui proposent 500 places en moyenne car une grande majorité d’entre elles sont à double niveau et elles parcourent 450 000 km par an », calcule-t-il. D’où une hausse de la capacité, qui a permis de passer de 72 milliards de places-km à 81 milliards de places-km.
Une demande exceptionnelle pour les TGV M
SNCF Voyageurs ne compte pas seulement demander des pénalités à Alstom suite aux retards de livraison du TGV M. La société a aussi négocié un million de km en pré-exploitation. Une demande nouvelle pour SNCF Voyageurs qui veut ainsi s’assurer que les rames soient immédiatement « parfaites » dès qu’elle les exploitera.