Pour le secrétaire général de la SNCF, Stéphane Volant, le partenariat avec les territoires fait partie intégrante du patrimoine génétique de l’entreprise. Un partenariat multiple qui, dans le domaine de la grande vitesse, a donné naissance aux Clubs TGV.
La Vie du Rail. La SNCF se veut partenaire des territoires. Quelles sont les dimensions de ce partenariat ?
Stéphane Volant : La SNCF n’a jamais cessé d’adapter ses moyens matériels et humains à l’évolution des besoins et des contraintes du territoire national et des territoires locaux, en relation avec les orientations stratégiques des pouvoirs publics.
Elle fut un bras armé d’un Etat fort au service d’un développement homogène des territoires, sorte d’outil de péréquation des solidarités territoriales à travers l’offre ferroviaire perçue comme l’idée de la modernité.
Surgissent depuis trente ans des défis qui modifient partiellement le cadre de cette relation historique :
• la décentralisation de l’action publique,
• l’émergence d’une gouvernance territoriale en « mode projet »,
• l’ouverture à la concurrence du marché du transport ferroviaire.
Ce partenariat reste cependant un élément de son patrimoine génétique qui perdure au-delà de ces évolutions. La SNCF, ce n’est pas que le transport mais aussi la vie qui va avec.
La SNCF apporte une expertise complète au service des territoires et de leurs élus. Elle est le partenaire naturel de la réalisation de leurs objectifs. Elle est une force de propositions.
Cette expertise en direction des territoires dépasse en effet largement l’activité transport et concerne toute la SNCF. Que ce soit le matériel, l’infrastructure, l’immobilier et le foncier, le TGV ou le fret, les gares, la sûreté, etc. Qu’il s’agisse d’aménagement du territoire, de développement économique, de protection de l’environnement, de sécurité, de tourisme, ou même d’éducation, de formation professionnelle ou de sport, la SNCF est un partenaire actif. Le groupe s’inscrit ainsi dans une démarche d’intérêt général.
Quelques exemples concrets :
• une politique de recrutement dynamique, qui profite évidemment à l’ensemble des territoires, et notamment aux ZUS avec la démarche Egalité & Compétences (500 à 600 recrutements visés fin 2011),
• SNCF Développement, filiale dotée de 3,5 millions d’euros pour aider à la redynamisation de territoires fragilisés par une réduction de la présence du groupe. Elle a déjà opéré en Lorraine, Savoie et en Haute-Marne, sur le bassin de Langres-Chalindrey (recréation de 35 emplois pour le moment),
• les chantiers d’insertion, qui aident des personnes éloignées de l’emploi à travailler en se formant sur des périodes de 6 à 18 mois (plus d’une centaine de chantiers par an).
Nous sommes aussi à la manœuvre pour un dialogue nouveau avec les territoires, par exemple avec les clubs TGV ou clubs territoriaux. Il s’agit alors de travailler avec l’ensemble des forces socioéconomiques locales, de jouer un rôle de facilitateur et d’intermédiaire, pour capitaliser sur un projet de transport. Apporter notre expertise et notre expérience à des territoires qui vont bénéficier de l’arrivée du TGV pour en tirer le meilleur parti. Nous l’avons fait avec le TGV Est-européen, la ligne P (Pays de Meaux), puis le TGV Rhin-Rhône et continuerons en Bretagne par exemple.
LVDR. Pourquoi un tel positionnement ? Vous allez être mis en concurrence, sur le TET pour commencer dès 2014, sur les TER ensuite. Ce qu’on vous demande, n’est-ce pas d’abord et avant tout de rendre un meilleur service de transport ? Et à un moindre coût ?
S. V. : La qualité de service et la vigilance sur nos coûts de production sont le cœur de notre activité de transporteur, les fondamentaux sur lesquels nos clients nous attendent. Mais la SNCF n’est pas qu’un transporteur, c’est aussi un accompagnateur, voire un créateur, de la vie locale sous toutes ses facettes. Nos filiales jouent un rôle central dans la vie des territoires, dans le logement social avec ICF ou dans le transport urbain avec Keolis, mais aussi Greencove et l’autopartage, Distripolis et la logistique urbaine… Sans parler de l’évolution des gares, qui se transforment en véritables centres de vie, où l’on trouve des commerces, des services, des bureaux hôteliers…
LVDR. Les TGV, explique aujourd’hui la SNCF, coûtent cher à exploiter au-delà des lignes nouvelles. Si on limite, de plus en plus, les parcours TGV aux LGV, ne va-t-on pas reporter de plus en plus de trafic sur des transports conventionnés, TET ou TER. Est-ce que les régions ne seront pas les dindons de la farce ?
S. V. : Il ne peut y avoir de dindon de la farce. Le modèle économique du TGV doit être repensé, tout le monde s’accorde à le dire. Mais il est aussi évident que tous les besoins de mobilité de nos concitoyens doivent être satisfaits à un coût raisonnable pour tous. Et l’évolution des ressources financières des collectivités est une donnée incontournable pour les réflexions à venir.
LVDR. Les Assises du ferroviaire ont conclu à la nécessité de donner une plus grande importance aux régions. On retrouve la vieille idée d’une région chef de file. Comment la SNCF compte prendre en compte cette évolution si, cette fois, elle entre dans les faits ?
S. V. : Les régions sont d’ores et déjà nos partenaires naturels, et nos principaux clients ! Notre métier ne changera pas, il sera toujours d’offrir la meilleure offre de transport adaptée aux besoins des populations. Nous travaillons avec tous les représentants de collectivités, qu’ils soient aujourd’hui conseillers généraux ou régionaux. Nos sujets dépassent souvent les frontières des domaines de compétences d’un conseil régional ou général. On peut ainsi évoquer le transport scolaire, dépendant du conseil général mais qui doit impérativement être connecté aux trains régionaux. Le passage aux horaires 2012 en a été une parfaite illustration : tous les échelons territoriaux ont été concernés, et nous avons travaillé avec tous !
LVDR. Votre partenaire naturel, celui à qui on pense tout de suite, c’est la région. Quelle stratégie, vis-à-vis des autres collectivités territoriales, villes, agglomérations ou départements ?
S. V. : La SNCF apporte une expertise complète au service de tous les territoires et de leurs élus. Elle est le partenaire naturel de la réalisation de leurs objectifs. Cette expertise en direction des territoires dépasse en effet largement l’activité transport et concerne toute la SNCF.
Elle s’est affirmée aux yeux de tous les acteurs locaux, de manière explicite et convaincante, non seulement comme un évident « service de mobilité » mais aussi comme un levier reconnu comme tel pour le développement territorial, alors même qu’elle n’a jamais cessé de l’être.
La SNCF, à l’instar de la plupart des opérateurs de services aux territoires, a été amenée à reconsidérer sa posture traditionnelle de prestataire fonctionnel.
La progression de la décentralisation s’est traduite par une intégration des initiatives territoriales dans des stratégies globales. La réalité de celle-ci apparaît dans l’émergence de projets combinant les diverses politiques publiques que la loi confie aux institutions territoriales et structurant la vie collective locale, d’où la nécessité d’un dialogue renforcé avec tous les niveaux de collectivités.