L’Aérotrain : Une Vision Révolutionnaire
Perché au-dessus des plaines de la Beauce, un long rail de béton parallèle à la voie ferrée de Paris à Orléans témoigne d’une ambition audacieuse : celle de l’Aérotrain. Cette piste d’essai de 18 kilomètres, construite près de Saran, était destinée à tester les capacités d’un système de transport futuriste imaginé par l’ingénieur français Jean Bertin. L’Aérotrain visait à devenir un moyen de transport léger et rapide, capable de rivaliser avec l’avion. Développé dans les années 1960 et 1970, ce concept innovant reposait sur un système de coussin d’air à soufflerie, permettant au véhicule de s’élever et de réduire la friction, atteignant ainsi des vitesses bien supérieures à celles des trains conventionnels. Propulsé par un moteur à réaction, l’Aérotrain de Bertin promettait des performances exceptionnelles.
Le prototype Aérotrain 02 a réalisé ses premiers essais en 1969. En 1974, il a établi un record de vitesse impressionnant en atteignant près de 430 km/h. Cependant, malgré ces succès, le projet a rencontré des obstacles financiers et des préoccupations en matière de sécurité. Le décès du président Pompidou en avril 1974, un fervent défenseur de l’Aérotrain, a marqué un tournant décisif. Son successeur, Valéry Giscard d’Estaing, a décidé de ne pas poursuivre l’aventure, préférant se concentrer sur un projet de train à grande vitesse plus conventionnel : le TGV.
En 1977, le gouvernement a mis fin au financement du projet. La piste d’essai a été en grande partie démantelée, laissant l’Aérotrain de Bertin comme un projet inachevé. Aujourd’hui, il ne reste que l’imposant vestige de la Beauce et le souvenir d’une aventure industrielle audacieuse, symbole d’une époque où les ingénieurs rêvaient de révolutionner le transport. La revue Fiasco a même érigé l’Aérotrain en monument de l’échec dans son premier numéro de janvier 2023 : « Une ruine moderniste en pleine terre de Beauce. Une vanité contemporaine. Le ratage prophétique de cette matrice pour un programme de ‘pays utile’ qui propulse le monorail vers l’objet de culte, mémorial et autel du ratage. »