Après près de trois ans de négociations, d’ajustement du projet et de son tour de table, le projet de ligne de TGV marocain, reliant à la fin de 2015 Tanger à Kénitra (200 km), a été officiellement lancé. Le 10 décembre 2010, le roi du Maroc Mohammed VI a signé à Tanger un contrat de près de 400 millions d’euros pour la fourniture de 14 rames de TGV Duplex par Alstom Transport. Ce train à grande vitesse sera un trait d’union entre les plus grandes villes du royaume. A l’horizon 2015, Tanger (700 000 habitants), son port de commerce et son nouveau pôle économique de Tanger-Tétouan, ne sera plus qu’à 1 heure 20 de la capitale politique Rabat (1,6 million d’habitants) et à 2 heures 10 de sa capitale économique, Casablanca (3,2 millions d’habitants), contre respectivement 3 heures 45 et 4 heures 45 aujourd’hui. A terme, l’objectif est de transporter 10 millions de voyageurs chaque année sur cet axe, et 6 millions dès la première année, avec un cadencement à l’heure pour débuter.
Si tout se passe comme prévu, fin 2015, les trains seront exploités à 320 km/h sur la première section de 200 km de la ligne à grande vitesse entre Tanger et Kénitra, puis ils rejoindront Casablanca en empruntant le réseau classique, où ils circuleront à 160 km/h ou à 220 km/h, « selon la vitesse d’exploitation prévue par le client marocain en 2015 », précise Alstom. Equivalente à la LGV Paris – Lille, la construction de la nouvelle infrastructure implique 1 200 ha de territoire à préempter avant le début des travaux de génie civil, programmés en juin 2011. Le tracé comptera 200 grands ouvrages et 7 viaducs dont un de 1,7 km. Equipée en ERTMS et GSMR, la nouvelle infrastructure, qui doit être livrée fin 2014, sera apte au 350 km/h. Elle sera dotée d’un poste de commande à distance et d’un central sous-station à Rabat.
Coté matériel roulant, les motrices et rames seront conçues et fabriquées principalement en France, et livrées à partir de juillet 2014. Elles seront assemblées en trains dans un atelier de l’ONCF à Mghogha, près de Tanger. « Le TGV que nous livrerons est dérivé de la série en cours de livraison à la SNCF », explique Gian Luca Erbacci, directeur général de la région Europe du Sud d’Alstom Transport. « Nous apportons quelques modifications, compte tenu des conditions climatiques du Maroc ; il sera adapté pour affronter le sable et les hautes températures, et son système d’information-voyageurs sera bilingue arabe-français. » Quelques fournisseurs marocains déjà référencés par Alstom seront associés à la sous-traitance. Avec Systra, Egis Rail, RFF, la SNCF et Alstom à pied d’œuvre dans ce projet, les industriels français sont toutefois les fournisseurs presque exclusifs d’un système TGV clés en main « made in France » de dernière génération. Il faut préciser que le plan de financement repose lui aussi très largement sur la France. Sur 1,8 milliard, le Maroc contribue à hauteur 500 millions d’euros. La France apporte 920 millions d’euros dont 75 millions donnés par l’État français et 845 millions d’euros de prêts attribués à taux plancher. La contrepartie à ce financement coule de source : l’attribution de gré à gré des marchés aux industries de la maison France. En dépit de cette coopération financière hexagonale, le Maroc aura mis quelques mois à boucler son tour de table, que les alliés arabes saoudiens, koweïtiens et d’Abou Dhabi sont venus compléter avec une participation à hauteur de 380 millions. Depuis la signature d’un protocole d’accord avec la France en octobre 2007, le projet est passé de 2,2 milliards à 1,8 milliard et le nombre de trains à fournir de 18 à 14. Mais, comme le notait le PDG d’Alstom Transport, Philippe Mellier, cité par l’AFP : « C’est un très beau contrat pour un début. »