Ce sera une première : la première fois qu’une entreprise espagnole produit de A à Z des trains à grande vitesse qui ne sont pas destinés à la péninsule ibérique. Dernier cri et dotés de nombreux éléments de confort, les douze trains CAF, des rames de six voitures pouvant transporter 419 voyageurs, rouleront en Turquie à 250 km/h. Ils sont dotés de la climatisation, d’un système de compensation de l’onde de pression, de la vidéosurveillance et d’un système d’information voyageurs. Côté confort à la place, on trouve, comme dans un avion, un bouton d’appel du personnel de bord, un système d’écoute musical et des écrans vidéo LCD (ces écrans sont même individuels, incrustés dans l’appui-tête, pour les 55 sièges de « business class »). Les deux premiers trains roulent depuis le 13 mars sur la ligne nouvelle Ankara – Eskisehir, tandis qu’un troisième exemplaire poursuit ses tests dynamiques. A la fin de 2010, les neuf autres rames devraient avoir été livrées aux chemins de fer turcs (TCDD).
C’est en juillet 2005 que le constructeur espagnol a été sélectionné par les TCDD, à l’issue d’un appel d’offres auquel avaient participé Bombardier ainsi qu’une alliance des deux japonais Hitachi et Mitsubishi. Il s’agissait de dix rames pour un montant de 180 millions d’euros. En octobre 2007, alors que la première rame sortie d’usine venait d’être réceptionnée en Turquie, le président des TCDD, Süleyman Karaman, en visite en Espagne a souscrit un avenant pour deux rames supplémentaires. Le total du contrat s’élève à 215 millions d’euros, soit quelque 18 millions d’euros la rame. A l’heure actuelle, deux trains ont été livrés et circulent déjà sur la première portion de LGV ; un troisième est en cours de tests, et c’est fin 2010 que les douze rames devraient être arrivées en Turquie.
Côté technique, les trains livrés aux TCDD sont dotés d’« équipements électroniques et de sécurité modernes, précise le constructeur. Comprenant la détection incendie, un détecteur de boîte chaude et un système de surveillance de la transmission. » A noter, la présence de deux moteurs électriques sous caisse par motrice (les quatre voitures centrales), alimentés par un convertisseur à IGBT, ainsi que d’un système de freinage dynamique à récupération. Deux types de pantographe équipent le matériel, adaptés au gabarit turc conventionnel et à celui de la grande vitesse. Les équipements de signalisation sont doubles : ATS, le système turc, et ERTMS sont embarqués, avec un switch automatique de l’un à l’autre. Ceux de communication également, avec la radio sol-train classique et le GSM-R.
En mois de trois ans, CAF a remporté trois contrats en Turquie. En plus de celui de la grande vitesse, mi-2007, en joint-venture avec le constructeur turc Alarco, la ville côtière d’Antalya lui a passé une commande pour son réseau de tramways. Il s’agit de la conception, du développement et de la mise en route (commissioning) de quatorze trams sur une ligne nouvelle de 11 km (11 millions d’euros). A l’été, CAF a également signé un contrat avec Izban (joint venture entre les TCDD et Izmir Metroplitan Municipality) pour la fourniture de trente-trois trains de banlieue destinés aux « navetteurs » de la région d’Izmir, pour un montant de 123 millions d’euros.
En additionnant ces trois contrats, CAF dépasse les 400 millions d’euros de chiffre d’affaires en Turquie. L’unique contrat de grande vitesse à l’export doit en tout cas servir de vitrine pour concurrencer Alstom sur ce secteur. Comme le constructeur espagnol le fait déjà avec ses métros.
Cécile NANGERONI