Paradoxalement, si l’Italie n’a pas attendu la réglementation européenne pour libéraliser ses chemins de fer, puisque c’est en 2000 qu’une loi du ministre des Transports d’alors, Pier Luigi Bersani, libéralise le secteur, y compris les lignes nationales de transport de voyageurs, elle ne sera pas forcément la première à l’expérimenter. La concurrence frontale, Trenitalia la vivra à la mi-2011. L’opérateur historique italien n’aura qu’une petite longueur d’avance sur le nouvel entrant NTV (Nuovo Trasporto Viaggiatori), créé début 2007. Le 13 novembre dernier, le « Freccia Rossa » (flèche rouge) des FS a battu un record de vitesse en faisant un trajet Rome – Naples en 70 minutes. 11 minutes de grappillées grâce à l’ouverture du tronçon de 19 km à grande vitesse Gricignano – Naples. Et le 13 décembre prochain, la grande vitesse (300 km/h) sera officiellement ouverte sur l’intégralité de l’axe Turin – Salerne. Celui-là même qui verra circuler les trains privés de NTV. Il y a un an, les hostilités ont débuté avec l’ouverture d’une enquête de l’autorité de la concurrence italienne pour abus de position dominante contre la société publique Ferrovie dello Stato (FS) et le gestionnaire d’infrastructure Rete Ferroviaria Italiana, contrôlé par FS. Enquête diligentée à la demande de NTV qui les accusait de bloquer son accès au réseau. Mais alors que les FS communiquent amplement, les créateurs de la société NTV – Luca Cordero di Montezemolo, président de Fiat et de Ferrari, Diego del Valle, fondateur du groupe de mode Tod’s, l’industriel Gianni Punzo et Giuseppe Sciarrone, directeur général de Rail Traction Company, opérateur de fret – se font plutôt discrets ces temps-ci. Et leur partenaire industriel, la SNCF, entrée au capital à hauteur de 20 % en octobre 2008, observe un devoir de réserve. Travaillant dans leur coin à la mise au point de leur offre, ils ont successivement annoncé avoir trouvé le nom du futur train, .Italo, en lettres stylisées rouge et or, choisi par les internautes en mars ; la construction du centre de maintenance pour son futur parc de 25 rames AGV dans le sud de l’Italie, à Nola, sur les emprises de la plateforme multimodale Interporto Campano, en juin ; enfin, mi-novembre, la mise en ligne d’un blog dédié à .Italo. Un train qui devrait faire parler de lui prochainement. L’AGV d’Alstom commandé à 25 exemplaires (plus 10 en option) à l’été 2008 (pour 650 millions d’euros) sera exploité pour la première fois en Italie. Le prototype déjà testé à Velim doit d’ailleurs partir dans la péninsule en janvier prochain, faire quelques allers-retours sur la LGV avant de débuter, dans la foulée, sa campagne d’homologation en Italie. La première rame de série est prévue pour septembre 2010. Rappelons que sous la patte de Giugiaro, c’est d’un rouge Ferrari que le train s’habillera pour exploiter des liaisons sur les axes Turin – Salerne via Milan, Florence – Rome, Venise – Rome et Rome – Bari. Au total, il est prévu de faire circuler 54 trains quotidiennement sur les axes à grande vitesse, soit une production kilométrique annuelle de 13,5 millions. Sur un marché évalué à près de 150 000 voyages par jour en 2015, avec un trajet moyen de 320 km, « NTV vise une part de marché de 20 %, soit 30 000 voyages par jour et 10 millions par an et 3,3 millions de voyageurs par kilomètre », affirmait le DG Giuseppe Sciarrone à l’été 2008. Côté rentabilité, l’équilibre est espéré en trois ans, avec « les premières marges opérationnelles dès 2013 ». Le credo de NTV ? Le voyage, moment de plaisir ! « Un moment agréable pour chaque voyageur, qu’il soit de loisirs, touriste ou homme d’affaires. Notre offre sera personnalisée et présentera un bon rapport qualité/prix », expliquait pour sa part le président Luca Cordero di Montezemolo. Parlant à demi-mots d’aménagements intérieurs particuliers, de services comme Internet ou la télévision, NTV précise que son client « sera pris en charge dès la gare ».
Cécile NANGERONI