Les deux gares de l’agglomération rémoise accueillent chacune les TGV. Très accessibles, l’activité tertiaire et l’habitat s’y sont développés de concert.
Avant l’arrivée du TGV Est, en juin 2007, la gare de Reims était plutôt insérée dans un quartier en déshérence. Pourtant située en plein centre-ville, elle était adossée à un terrain vague. « Dix ans avant l’arrivée du TGV Est, le Crédit mutuel s’est mis à réhabiliter les bâtiments Goulet-Turpin, ancêtres des supermarchés. Ce qui a commencé à donner une âme à ce quartier et à attirer des entreprises. D’autres investisseurs ont à leur tour aménagé des superficies, construit des bâtiments, des bureaux et des logements. Puis la SNCF a réhabilité la gare. Le quartier a changé », raconte Jean-Yves Heyer, le directeur de l’agence Invest in Reims, créée pour dynamiser l’agglomération. Désormais, 6 000 à 8 000 m2 de bureaux neufs sont édifiés chaque année autour de cette gare de centre-ville, sur une superficie pouvant en accueillir jusqu’à 120 000 m2. La mise en service du TGV Est s’est aussi accompagnée de la création d’une gare, la gare TGV-Champagne-Ardenne sur la commune de Bezannes, à deux pas de Reims. « Cette gare TGV est quasiment en centre-ville, puisqu’on peut y aller en 8 minutes », souligne Jean-Yves Heyer. « L’arrivée du TGV a été réussie car nous avons la chance de disposer de deux gares, l’une historique en plein centre-ville qui accueille le TGV en provenance de Paris, une autre d’interconnexion qui n’est pas en pleine campagne mais proche et très facile d’accès grâce au tramway et à l’autoroute », résume Serge Pugeault, adjoint PS au maire de Reims, chargé du développement économique et des grands projets. L’agglomération (six communes dont Reims, qui rassemblent 220 000 habitants) a fait le choix de développer à la fois l’activité tertiaire et l’habitat autour des deux gares, en pariant sur leur accessibilité : il faut 30 minutes pour aller de Reims à l’aéroport parisien de Roissy-Charles-de-Gaulle, 45 minutes jusqu’à la capitale, 2 heures 20 à Lyon, 1 heure 30 à Lille, 4 heures à Marseille ou encore 2 heures à Bruxelles. Reims Métropole a ainsi implanté autour de la gare TGV-Champagne-Ardenne une ZAC d’une superficie de 350 000 m2 dédiée aux bureaux. « L’agglomération ne doit pas être vue d’un point de vue strictement administratif, car elle n’a pas de réalité économique. Il faut regarder au-delà : le bassin de vie couvre une centaine de communes et 300 000 habitants, voire 740 000 personnes si l’on englobe un bassin plus large incluant les Ardennes, l’Aisne, la Marne », explique Jean-Yves Heyer. Mais la seule apparition du TGV ne s’accompagne pas forcément du développement de l’activité économique. « Les élus doivent se garder de toute illusion sur le fait que le TGV change radicalement un territoire », estime Serge Pugeault. « Le TGV a coûté 100 millions d’euros aux collectivités. Si le TGV apporte du tourisme, il ne fait pas tout. Il est un élément déclencheur. Il a fallu investir pour rendre le territoire attractif », renchérit Jean-Yves Heyer. « On a senti les premiers effets de ce dynamisme deux ans avant l’arrivée du TGV. » Sur la période 2008-2014, quelque 3 milliards d’euros d’investissement ont été programmés par les collectivités et le secteur privé. Selon Invest in Reims, 4 200 emplois ont été créés depuis 2005 par 98 entreprises. A terme, 1 700 étudiants devraient s’installer à Reims, sans doute grâce au TGV. L’Ecole centrale de Paris y a ouvert ses portes, ainsi que Sciences Po Paris, qui dispense dans son école (un ancien collège jésuite) tous ses cours en anglais. Selon l’agence Invest in Reims, il reste 3 000 m2 de bureaux inoccupés sur un parc de 600 000 m2. Quant aux logements, ils ont tous été vendus. Sodexo, qui édite les tickets restaurant, ou un grand nom comme Ikea font partie des nouveaux venus. Des services y ont aussi été créés, comme une crèche d’entreprise ou un hôtel. Et d’autres entreprises projettent une prochaine implantation. « Tout cela a permis de rassurer sur l’attractivité de Reims. Beaucoup de projets se positionnent autour de cette gare, ce qui en fait un quartier en pleine effervescence », poursuit Jean-Yves Heyer. Des propos nuancés par Serge Pugeault. « TGV ou pas, Ikea se serait de toute façon installé dans les environs de Reims. Nous n’avons pas vraiment accueilli des entreprises venues de l’extérieur mais plutôt des entreprises locales qui ont déménagé pour être mieux desservies et disposer de locaux plus modernes », souligne l’élu. Toutefois, pour l’avenir, Serge Pugeault, qui est aussi depuis le 15 novembre le tout nouveau président d’Invest in Reims, est optimiste : il pense que certains sièges sociaux, notamment ceux de banques installées à Paris-la-Défense, pourraient être tentés par une délocalisation à Reims où l’immobilier est moins cher. « On sait que des réflexions sont en cours », affirme-t-il. Ce qui est certain pour tous, c’est que sur la carte Reims s’est rapproché de Paris. « Reims concentre tous les avantages de la province sans les inconvénients », affirme Jean-Yves Heyer, qui conclut : « Reims était une belle endormie qui s’est réveillée en 2005. »