C’est une célébrité dont elle se serait volontiers passée : la « virgule » d’Avignon est sans nul doute la plus connue du genre par les amateurs du monde ferroviaire. Au départ, il y avait donc une gare nouvelle, celle d’Avignon TGV, inaugurée en 2001. Et un kilomètre de voie nouvelle à construire pour assurer quatre kilomètres de liaison intergares, en moins de cinq minutes, avec Avignon Centre. Seulement, voilà : lorsqu’il a fallu, au fil des derniers mois précédant la mise en service, jouer les économes et rogner ce qui pouvait l’être sur le projet à grande vitesse du TGV Méditerranée, Avignon TGV a perdu une « virgule » qui lui semblait promise. Autrement dit, ces quelques (petits) kilomètres de ligne ferroviaire dédiée aux TER en provenance de la gare d’Avignon Centre jusqu’à celle du TGV. Evoquée dès 1997 et, depuis, régulièrement sacrifiée sur l’autel des restrictions budgétaires. La « virgule », telle l’Arlésienne… Et lorsque l’on voit le train du progrès passer, il est difficile ensuite de le rattraper.
Plus de dix ans plus tard, après d’interminables phases d’études, de concertations, de discussions, ce devrait être chose faite. Et la pose officielle, le 27 juin, de la première pierre de la liaison ferroviaire entre Avignon TGV et Avignon Centre avait pour beaucoup la saveur de ces plats très longtemps mijotés. « Entre le certain temps de Fernand Raynaud et le temps long de Fernand Braudel », a ironisé le directeur régional de RFF, Marc Svetchine. « Désormais, on tient le bon bout. »
Du temps donc, il en a fallu plus que de raison pour trouver un accord, en particulier sur le financement. Pour convaincre, notamment, une ville d’Avignon qui faisait preuve d’un enthousiasme tout mesuré pour la seule « virgule », les partenaires ont décidé de faire coup double. Les travaux de la nouvelle liaison entre Avignon Centre et Avignon TGV s’inscrivent en effet dans la perspective de la réouverture de la ligne Avignon – Carpentras. Comme le réaffirme Marie-José Roig, la présidente de la communauté d’agglomération du Grand Avignon, « tout cela sera optimal seulement après la réouverture de Carpentras – Avignon. Tous les principaux pôles du Vaucluse seront alors reliés à la grande vitesse ».
La mise en service de la liaison Avignon Centre – Avignon TGV – dont les travaux pour réaliser le tronçon manquant d’un kilomètre de voie ferrée attendu depuis plus de dix ans ont commencé en mars dernier – est annoncée pour décembre 2013. Soit une année avant la réouverture promise d’Avignon – Carpentras, qui doit donc permettre de « connecter tout le Vaucluse à la grande vitesse ferroviaire ». Comme le note Marc Svetchine, « on a longtemps fermé des voies. Aujourd’hui, on en construit et on en rouvre… »
La « virgule » sera donc une première étape. Elle permettra de relier, en cinq minutes, au rythme d’un train toutes les quinze minutes en heure de pointe, Avignon TGV à Avignon Centre, au lieu d’une quinzaine de minutes, hors embouteillages, par bus. Et de faire du train une véritable alternative à la route. Ou plutôt, selon Michel Vauzelle, président du conseil régional Paca, le « trait d’union » pour une des très grandes villes régionales. Ou encore, selon Hugues Parant, « la navette, symbolique et concrète qui relie le réseau TGV à l’ensemble du réseau TER ».
A travers ces petits kilomètres de liaison nouvelle, c’est le concept même de ce que doit être une gare TGV qui est réaffirmé. Comme le souligne Marc Svetchine, « nous tenons beaucoup à ce type d’opérations. Car nous avons une volonté forte de ne pas promouvoir des gares aéroports. » Autrement dit de celles où l’on vient uniquement en voiture, style gare des « betteraves » ou « des garrigues… »
Un « modèle » qui trouve vite ses limites, comme on peut d’ailleurs le constater à Avignon TGV. Le développement et le succès du TGV ont vite submergé les capacités du parc de stationnement et créé, régulièrement, une congestion routière aux alentours de la gare. Dans cette gare recensant une augmentation annuelle de 3 % de sa fréquentation, avec trois millions de voyageurs qui y transitent chaque année, la « virgule » devrait, outre son impact en termes de service ferroviaire, permettre également de désengorger la circulation routière.
Ce trait d’union, le responsable régional de RFF l’inscrit dans un projet global, « avec un train dédié à tous les types de déplacements de la vie quotidienne, ce qui comprend aussi le TGV. Cela permet de mieux concurrencer les autoroutes, de ville à ville ». Dans un peu plus de deux ans, ce que Michel Vauzelle dénomme « une erreur d’aménagement » devrait ainsi être réparée. Avec le petit kilomètre qui change tout et qu’on attendait.
Plus de dix ans après la mise en service de la ligne nouvelle Méditerranée…
Pascal GRASSART
32,25 millions pour huit partenaires
Inscrit au contrat de projets Etat-région 2007-2013, ce chantier de 37,25 millions est cofinancé par huit partenaires : l’Etat (25 %), la région Paca (25 %), le département du Vaucluse (18,75 %), RFF (12,5 %), le Grand Avignon (7 %) et les trois intercommunalités du Ventoux-Comtat Venaissin, des Pays de Rhône et Ouvèze et des Sorgues du Comtat (11,8 %).
Qui fait quoi ?
– RFF est propriétaire et gestionnaire des infrastructures ferroviaires qu’il aménage : voies, quais, ouvrages d’art.
– Le conseil régional Paca est l’autorité organisatrice des transports régionaux.
– La SNCF gère les gares et exploite les TER.
– Le département, les intercommunalités et les communes réalisent les aménagements de voirie et organisent les transports permettant l’accès au train : bus, vélos, voitures…