Depuis le remplacement, au milieu des années 1990, de l’opérateur historique britannique British Rail par des opérateurs privés, dans le cadre du système des franchises mis en place par les Conservateurs, les adversaires des privatisations de tous les pays prennent les chemins de fer d’outre-Manche comme un contre-exemple.
Par la suite, malgré certaines réussites avant la pandémie de Covid mais aussi à cause de plusieurs échecs, le système des franchises a fini par être remis en cause par Boris Johnson, alors qu’il était premier ministre conservateur, pour être remplacé par un nouvel organisme : Great British Railways (GBR), propriété de l’Etat, qui reprendrait un rôle de stratège tout en laissant une place au secteur privé.
Pour autant, le nouveau modèle présenté en mai 2021 a du plomb dans l’aile : le 19 octobre 2022, la nouvelle secrétaire d’Etat britannique aux Transports, Anne-Marie Trevelyan, a annoncé à la Chambre des Communes que le projet de loi portant sur la création de GBR ne se ferait pas adopté au cours de la présente session parlementaire. Le nouvel organisme devait débuter ses activités en 2024, mais ce calendrier est désormais remis en cause, dans un contexte de plus en plus incertain, tant économiquement que politiquement, alors que comme partout, les candidats aux métiers ferroviaires se font rares.
Partisans depuis toujours des nationalisations, les Travaillistes, qui s’étaient pourtant accommodés du système des franchises du temps de Tony Blair et de Gordon Brown, ont réaffirmé leur position historique au cours de leur conférence annuelle, du 25 au 28 septembre à Liverpool, avec la publication d’un livre blanc intitulé GB Rail.
Pour autant, un chemin de fer (re)nationalisé fait également peur outre-Manche, jusqu’au sein même du parti travailliste. En effet, Lord Berkeley, pair travailliste à la Chambre des Lords et grand connaisseur des systèmes ferroviaires britannique et français, n’a pas caché son « inquiétude » que les chemins de fer britanniques finissent par devenir comme les chemins de fer français. « Je pense que le système ferroviaire français est le plus inefficace, le plus cher, le moins créatif et celui qui ferme le plus de lignes au monde », a déclaré Lord Berkeley. En réponse, Tan Dhesi, chargé des Transports au parti travailliste, a assuré Lord Berkeley que « nous ne reprendrons pas les pires pratiques des autres », ajoutant que les Travaillistes chercheraient plutôt à mettre en oeuvre les meilleures pratiques des chemins de fer d’État à travers le monde.
👉 Cet article est tiré du numéro 3912 de La Vie du Rail.
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Avec cette tendance, il sera curieux de savoir quels organismes étatiques à succès seront pris comme modèle par les autorités qui décideront de l’avenir des chemins de fer britanniques. Les systèmes ferroviaires nationaux d’Espagne, d’Allemagne, d’Italie et de Suisse sont peut-être les premiers exemples marquants qui viennent à l’esprit.
Si elle voit la lumière du jour, GBR (Great British Railways) est une future entreprise publique nationale britannique, chargée de l’exploitation et de la supervision du réseau national ferroviaire en Grande-Bretagne (l’Irlande du Nord étant pourvue d’un réseau ferroviaire séparé), succédant au système actuel de franchises et à Network Rail.
L’autorité organisatrice, gérée par le Department for Transport, sera chargée de la commercialisation des services et des prix, de la supervision des opérateurs et de la gestion du réseau de transport ferroviaire au Royaume-Uni.
Annoncée le 20 mai 2021, elle est censée d’être mise en place en 2023.
GBR opèrera sur le modèle de Transport for London, en centralisant la commercialisation et en sous-traitant les dessertes à des opérateurs ferroviaires. Cette réforme suit l’écroulement du système actuel de franchises causé par la crise sanitaire de COVID-19.