Le salon des Transports publics qui s’est tenu du 12 au 14 juin, porte de Versailles à Paris, a accueilli plus de 11 000 visiteurs. Les principaux thèmes évoqués – le financement des infrastructures, la gouvernance, la concurrence ou l’ouverture des données – seront au coeur de la future loi d’orientation des mobilités attendue à la fin de l’année.
Une loi est à peine votée qu’une autre se profile. C’est dans cet intervalle que s’est tenu Transports publics 2018. Le pacte ferroviaire a été définitivement adopté par l’Assemblée nationale le mardi 12 juin, premier jour du salon de la Porte de Versailles, puis par le Sénat le jeudi 14 juin, son dernier jour. L’affaire était déjà pliée aux yeux des professionnels et ce n’est pas la manifestation de cheminots de SUD Rail dans les travées du salon qui les a fait changer d’avis. Ce qui n’est pas plié, qui interroge ou inquiète, c’est le prochain chapitre : la loi sur les mobilités. Élisabeth Borne, venue inaugurer le salon le deuxième jour, a continué de distiller quelques indications sur son contenu. En concentrant son propos sur l’ouverture des données. La ministre des transports a annoncé « un cadre qui libère l’innovation et vous permette à vous, collectivités territoriales, réseaux scientifiques et techniques, start-up, entreprises, de développer et déployer » de nouvelles solutions de mobilité. Car on attend beaucoup de l’innovation pour atteindre l’objectif de la loi : garantir la mobilité pour tous, en supprimant les zones grises, sans autorité organisatrice ni moyens adaptés. « Nous préciserons dans la LOM, a-t-elle dit, les conditions d’ouverture des données nécessaires au développement de services d’information sur les offres de mobilité. Concrètement, les données statiques (arrêts, horaires, tarifs, accessibilité aux personnes handicapées) et en temps réel (horaires, perturbations, disponibilité des vélos en libre-service…) seront rendues accessibles à tous, dans des formats ouverts, d’ici 2020 dans les principales métropoles et axes transeuropéens, et d’ici 2021 sur tout le territoire. »
Élisabeth Borne a pu lors de sa visite entendre une nouvelle fois la demande du Gart formulée par Louis Nègre : le lancement tant attendu du troisième appel à projets. Et s’est vu recommander par le même Louis Nègre le scénario C, le plus ambitieux du Conseil d’orientation des infrastructures. Double proposition à laquelle on n’a pas souvenir d’avoir entendu de réponse.
Avant même le discours de la ministre, la LOM a fait l’objet de la première conférence plénière. François Poupard, le directeur général de la DGITM, a affirmé que le texte serait le résultat d’une « coconstruction », terme devenu, avec « écosystème », le passage obligé de tout discours. Selon lui, « la loi va permettre (et non pas obliger) aux collectivités locales d’innover pour développer des solutions qui ne seront pas les mêmes, dans une zone dense, très dense, ou dans une zone rurale ».
Thierry Mallet, président de l’UTP (et PDG de Transdev), qui intervenait au cours de cette conférence, rappelle : « l’objectif de la LOM est d’avoir un nouveau cadre avec la volonté d’offrir des services de mobilité partout sur le territoire ». Concrètement, cela signifie que la loi va permettre à des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) d’intervenir sur l’ensemble du territoire. Ce qui n’est pas le cas actuellement puisqu’une large part du territoire ne dépend pas d’une AOM. Deux échelons territoriaux devraient être possibles : d’une part les communautés de communes, d’autre part les régions. Et un versement mobilité devrait être mis en place pour le financement.
Comment ouvrir la donnée pour qu’elle soit utile à la collectivité et pas pour le seul profit des géants du Net ? La mise à disposition de la donnée pourra donner lieu à rémunération, a indiqué François Poupard. La réponse est-elle à la hauteur ? Des professionnels en doutent. Thierry Mallet plaide pour que l’autorité organisatrice des mobilités soit responsable de « l’intégration des données ». Selon le président de l’UTP, la meilleure réponse aux enjeux de l’ouverture des données est locale : « Google restera toujours l’alternative globale, mais au niveau local, on voit bien que les solutions de proximités sont les plus pertinentes, elles sont bien connues et permettent une finesse de l’information que les grands acteurs n’ont pas ou dont ils ne se soucient pas. Récupérons les données grâce aux applications locales ! », souhaite Thierry Mallet.
La LOM devrait enfin donner un rôle de régulation et de contrôle sur l’ouverture des données à l’Arafer. Actuellement, le gardien des activités ferroviaires et routières ne dispose pas de ces compétences, mais il embauchera, a précisé à VR&T François Poupard. « L’Arafer aura la capacité à intervenir en cas de plainte et pourra saisir la justice s’il le faut », a-t-il ajouté. Une fois « stabilisé », le projet de loi pourra passer en Conseil des ministres cet automne avant son adoption par le Parlement vers la fin de l’année.