Nous poursuivons cette semaine notre série estivale sur la place prise dans la culture populaire par trois « figures » ferroviaires : les cheminots, les gares et les resquilleurs. Aujourd’hui, nous nous penchons sur la présence des gares dans la littérature, le cinéma ou encore la musique. Un lieu à part, où se joue depuis toujours, une comédie humaine qui a inspiré nombre d’artistes.
« Malheureusement ces lieux merveilleux que sont les gares, d’où l’on part pour une destination éloignée, sont aussi des lieux tragiques, car si le miracle s’y accomplit grâce auquel les pays qui n’avaient encore d’existence que dans notre pensée vont être ceux au milieu desquels nous vivrons, pour cette raison même il faut renoncer au sortir de la salle d’attente à retrouver tout à l’heure la chambre familière où l’on était il y a un instant encore. Il faut laisser toute espérance de rentrer coucher chez soi, une fois qu’on s’est décidé à pénétrer dans l’antre empesté par où l’on accède au mystère, dans un de ces grands ateliers vitrés, comme celui de Saint-Lazare où j’allais chercher le train de Balbec, et qui déployait au-dessus de la ville éventrée un de ces immenses ciels crus et gros de menaces amoncelées de drame, pareils à certains ciels, d’une modernité presque parisienne, de Mantegna ou de Véronèse, et sous lequel ne pouvait s’accomplir que quelque acte terrible et solennel comme un départ en chemin de fer ou l’érection de la Croix. » Cet extrait d’A la recherche du temps perdu de Marcel Proust exprime avec force toute l’ambiguïté de la gare, un lieu source d’espoirs, mais aussi d’inquiétudes. Une ambivalence qui traverse les nombreuses oeuvres des artistes qui s’y attardent. Les gares ont vu le jour avec le chemin de fer. Elles se sont développées en parallèle à celui-ci, devenant iconiques des lieux qu’elles desservaient. Naturellement, le rail est devenu très tôt une source d’inspiration.