Critique du livre « Descente aux enfers, Vie et mort de la SNCF » édité chez Fayard de Christophe Dubois et Marie-Christine Tabet
Noir comme le polar, apocalyptique comme la SF, il y a le livre sur la SNCF. Chaque année, ou presque, sort un livre dénonçant le scandale, vilipendant la gabegie, annonçant la catastrophe, révélant enfin ce que personne n’avait osé dire. On a connu, dans l’ordre et sans souci d’exhaustivité : SNCF : Le rapport interdit (Christian Julienne, 1996), SNCF : La machine infernale (Nicolas Beau, Laurence Dequay, Marc Fressoz, 2004) ; SNCF. Un scandale français (Pascal Perri, 2009) ; FGV. Faillite à grande vitesse (Marc Fressoz, 2011) ; SNCF, Un scandale peut en cacher un autre (Julie Pichot et Dominique Brillet, 2018).
S’ajoute cette année Descente aux enfers, Vie et mort de la SNCF, de Christophe Dubois et Marie-Christine Tabet. Le livre se place dès les premières lignes sous l’autorité du dernier livre de Michel Houellebecq : « La SNCF était une des entreprises dont j’aurais assisté, de mon vivant, à la faillite et à la dégénérescence complète. »
Il sera donc question de l’entreprise mais, ce qui intéresse vraiment les auteurs c’est le pouvoir, et c’est donc avant tout Guillaume Pepy, à qui est consacrée toute la partie centrale d’un livre qui paraît quand toute la presse s’intéresse à sa personne et à sa prochaine succession. « Meilleur d’entre nous », « Gilet rouge de la République », « Ami des médias », tout y passe. Les personnages secondaires ne sont pas oubliés. Patrick Ropert, « le méchant », Stéphane Volant, qui « a des amitiés dans tous les partis » ou l’éphémère Matthias Vicherat, qui aura eu le tort de voir son nom « cité comme futur numéro 1 ». Les auteurs braquent le projecteur sur le conseiller en communication Matthias Léridon et les factures extravagantes que présente sa société Tilder. L’amateur d’anecdotes y trouvera vaguement son compte. Ne soyons pas injustes, le chemin de fer n’est pas absent, et les auteurs savent quand il le faut parler du rapport Rivier ou du document « Etat et performance du réseau » de 2015. Mais l’analyse est courte. Et la « dégénérescence complète » n’est ni établie, ni expliquée. La fin du livre, imaginant en 2037 un TGV supplanté par Hyperloop et une SNCF centenaire qui n’est plus que l’ombre d’elle-même laisse le lecteur sur une faim que le livre n’a su ni attiser, ni apaiser.