Le groupe CRRC pèse à lui seul plus que Siemens, Alstom et Bombardier réunis et il vient de faire l’acquisition de la partie ferroviaire du tchèque Skoda. » La fin de cette déclaration de Christophe Sirugue dans un entretien accordé aux Échos du 5 décembre n’est rien de moins qu’un véritable coup de tonnerre dans le paysage industriel ferroviaire européen. Depuis plusieurs années, en particulier lors de la récente tentative de reprise des activités ferroviaires d’Ansaldo, on se demandait quand l’industrie chinoise finirait par prendre pied dans le marché européen. Désormais, c’est fait, ou sur le point de l’être. Fin novembre, China Railway Rolling Stock Corp (CRRC) a reconnu être en pourparlers avec le constructeur tchèque Skoda Transportation. Plus précisément, CRRC Zhuzhou Electric Locomotive Co (Zelc), la filiale de CRRC spécialisée dans les locomotives électriques, a été chargée des négociations pour reprendre 100 % du capital de Skoda Transportation.
La partie ferroviaire de Skoda possède un beau catalogue, comme ont pu le constater les visiteurs du salon InnoTrans de cette année : tramways, locomotives électriques (dont une petite série pour les trains régionaux à 200 km/h de la DB), des voitures (en particulier à deux niveaux) et des trolleybus, ainsi que des moteurs de traction ou des chaînes de traction complètes. Avec ce rachat d’un constructeur établi de longue date en Europe centrale et orientale, qui a récemment repris les activités ferroviaires du finlandais Transtech, le groupe ferroviaire chinois disposera d’un portefeuille complet dans le domaine du matériel roulant ferroviaire… mais aussi des bus électriques. Ce rachat de Skoda Transportation par une filiale de CRRC, deux entreprises qui coopèrent déjà sur plusieurs projets, intervient deux mois après la signature par Zelc d’un contrat pour fournir des automotrices au nouvel entrant privé tchèque LEO Express. Poussée par la résolution de la députée européenne Martina Werner, l’Europe devrait finir par réagir. Et le gouvernement français s’intéresse à un « Buy American Act » en Europe. Un sujet prioritaire du Comité stratégique de la filière ferroviaire, qui se tient aujourd’hui à Bercy.